vendredi 23 mai 2014

Etonnante Carmen

Il me fallait inaugurer la ClassicCard, mon si bien choisi cadeau de fin de stage. F. et son amie m'entraînent au Komische Oper voir une Carmen. Grâce à la carte, nous nous présentons au dernier moment, et pour 10 euros nous sommes au tout premier rang ! La salle a le charme des vieux théâtres, mais - ce qui nous occupe longuement - chaque siège est équipé d'un petit écran qui propose une traduction du livret en temps réel.

D'un point de vue instrumental et vocal, la soirée est magnifique. A l'Einleitung de la musique de Bizet, je reconnais aussitôt, à l'intimité des accents, un morceau jadis travaillé à la flûte. La mise en scène contemporaine alterne les excellentes trouvailles et les curiosités. L'apparition de Carmen est terrriblement réussie : en sorcière, dans un corsage rouge, coiffée d'un haut-de-forme, le visage peint à la façon d'une tête de mort, elle chante L'Amour est enfant de bohème en remuant une marmite.

La scène est transposée dans un approximatif XXème siècle et dans les milieux ouvriers. Les références marxistes et anarchistes se mêlent à l'imaginaires des gangsters américains et au reportage journalistique de fait divers. Cette multiplication dilue le sens de la pièce, dont la vue d'ensemble peine à émerger au milieu du fourmillement de détails. Mais c'est surtout l'interprétation des personnages qui me déçoit. Le couple principal, ce qui n'est déjà pas à son avantage, est mal assorti : la cantatrice, grande et svelte, domine son replet prétendant d'une bonne tête. Carmen n'est qu'une intrigante, une allumeuse ; Don José un faible dominé par ses sens dont la belle joue sans scrupule. J'aurais aimé une femme plus complexe, tout à la fois sincèrement éprise et foncièrement indépendante, une héroïne entière et passionnée qui m'emporte dans son histoire. Quand elle chante "Je suis amoureuse", elle n'est plus crédible, et quel dommage...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire